Anatomie d'une chute : l'exception française

 

Film ayant obtenu la palme d'or, une récompense d'ailleurs données à des films ne faisant pas l'unanimité, Anatomie d'une chute de Justine Triet, rencontre un certain succès en salles. Et ce je peux dire c'est que je trouve ça amplement mérité et largement souhaitable lorsque certains acteurs politiques tentent de détruire le cinéma français.

Un film à digérer

Il y a des films qui marquent plus que les autres et j'aime à dire que ce sont des films à digérer. Une fois la séance terminée certaines questions subsistent car le film soulève des questions, n'y répond pas systématiquement mais le langage cinématographique apporte des éléments de réponse. En effet, hormis le débat avec moi-même, nous n'étions pas forcément d'accord avec mes amis sur certains éléments de l'intrigue. Là où c'est intéressant c'est que le débat portait directement sur la manière qu'avait le film à montrer les choses et pas au contraire à sa façon de masquer les informations comme pourrait le faire un polar ou un thriller sans mise en scène.

Anatomie d'une chute raconte l'histoire d'une femme inculpée pour le meurtre présumé de son mari qui a lieu hors champ. La raison ? Une grande portion de l'histoire est racontée du point de vue du fils, malvoyant, et alors absent lors des faits. Dispute de couple ? Préméditation ? Accident ? Suicide ? toutes les éventualités sont évoquées par les enquêteurs et témoins lors du procès mais le cœur du film sera, au delà de la vérité, l'impact de toutes ces suppositions et témoignages sur l'enfant.

Le film aura tout de même des scènes racontées du point de vue de Sandra, l'écrivaine inculpée, car elle est après tout, la protagoniste.


La révélation

Comme vous vous en doutez, le film ne montrera pas la mort du mari. Mais c'est au travers de l'enquête et du procès que l'on pourra, en tant que spectateur, essayer d'imaginer le plus plausible. C'est d'ailleurs illustré par l'enfant qui, pendant le procès, doit fermer les yeux pour s'imaginer les différentes éventualités. L'avocat général a beau être horrible, en réalité il ne fait que son métier qui consiste à tordre la vérité pour que l'accusée soit condamnée. La défense ne sera pas forcément meilleure, faisant elle-même preuve de mauvaise fois pour forger une vérité la plus apte à innocenter Sandra. Quasiment comme un Gone Girl inversé qui critiquait le rôle des media et la perception du couple dans la société américaine, ici la démonstration d'un procès montre toutes les limites de la justice et de son impact sur les citoyens.

Sauvons le cinéma français

Justine Triet a également fait parler d'elle utilisant son temps de micro lors de la récupération de la palme pour dénoncer un gouvernement néolibéral en train de casser l'exception culturelle française. Si on pourra détecter un discours pas du tout improvisé et donc clairement préparé, ça n'aura pas manqué de faire réagir notamment la ministre de la culture ainsi que d'autres journalistes préférant s'attaquer à la personne ou réfuter carrément ses accusations. Force est de constater que quelques mois plus tard un rapport de la Cour des comptes demande plus de contrôle de la part du gouvernement sous prétexte des aides supplémentaires reçues durant la crise covid. Le CNC a toujours été bénéficiaire et créé, entre autre, l'exceptions culturelle française qui permet à plein de jeunes réalisatrices et réalisateurs de débuter dans le cinéma. Aujourd'hui ce rapport et les réactions de certains demandant plus de contrôle ou souhaitant totalement annuler le principe de subventions donnent raison à son discours. J'espère que son succès donnera tort aux ennemis du cinéma qui voudraient que tout film soit rentable. J'imagine qu'ils souhaitent que la France ne produise que des comédies populaires ? Moi non, et je prends l'Italie comme exemple de politique ayant tué le cinéma.



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