Gran Turismo : le nouveau pari de Playstation a-t-il dérapé ?

Avec Ratchet et Clank, Uncharted, The Last of Us, bientôt God of War et probablement d'autres licences comme Horizon, on peut dire que Playstation cinematic universe est entré dans la course alors qu'on a pénétré dans l'ère des adaptations de jeux vidéo.

 


Adaptation, ou faits réels ?

Avec Neill Blomkamp à la réalisation, on peut dire que Gran Turismo: Based On a True Story (ouai c'est le titre original du film) en avait sous le capot. Et si l'histoire est belle et bien inspirée de faits réels on aura effectivement la sensation d'un film ayant le postérieur entre 2 cockpits. D'une part on a l'envie de faire un biopic typique de films de sportifs avec l'histoire effectivement inspirée de Jann Mardenborough, pilote de course ayant décroché son premier siège chez Nissan grâce à la GT Academy. Et de l'autre, la volonté d'être une pub pour Gran Turismo en tant que simulateur ultra fidèle grâce à tous les gadgets de la marque Fanatec.

Le biopic sportif

Gran Turismo a tout de la formule du biopic. Jann ayant participé à des courses de karting étant jeune, et étant soutenu par ses parents est ici un gamin dans sa chambre que le père ne comprend pas. Le mécanicien Jack Salter interprété par David Harbour dur avec le protagoniste, et cette GT academy totalement militaire où les participants dorment dans un dortoir géant sont évidemment purement fictionnels, tout comme le personnage de Orlando Bloom d'ailleurs presque en surjeu pendant le film. Enfin l'ordre des événements sert évidemment le récit pour avoir une sorte de climax arrivé au Mans et un accident censé faire douter le héro en fin de deuxième acte.

Mais d'un joueur ?

Alors si l'ambition est de tordre la réalité  pour faire une adaptation de jeu vidéo, que fait le scenario pour nous faire ressentir la progression d'un simracer au sein des courses de GT ? Là aussi c'est en demi-teinte car, si on nous parle brièvement des lignes de courses au début, de sa connaissance de la mécanique ou de la sensation de flow qu'il ressent en conduisant, c'est vite oublié dans la suite du film, hormis ses fameuses trajectoires qui n'ont pas vraiment de sens dans l'acte final. Durant l'entrainement à la GT academy, Jann se plaint de freins qui gèlent qui est une chose qu'il pourra ressentir en vrai, mais très difficilement dans la simulation ce qui en fait déjà un mauvais choix pour mettre en valeur sa plus-value de joueur. Sa connaissance des circuits et des différents modèles de voiture n'est jamais non plus vraiment mise en valeur. Et le "flow" où il est censé sentir le temps ralentir et la vitesse c'est carrément ignoré.


Trop de maladresses ?

En fait le début du film va enchainer nombreuses maladresses. Déjà une séquence introductive qui est une pub pour le simulateur de courses qui fait doublon avec la scène suivante du directeur marketing de Nissan UK venant faire une présentation à la branche japonaise pour répéter ce qui a été dit dans la séquence introductive. L'intérêt du personnage d'Orlando Bloom est de montrer l'aspect purement marketing de la GT Academy mais en réalité cet aspect sera assez éclipsé. On retrouve donc notre jeune gamer dans sa chambre ce qui sera l'occasion de montrer un set-up réaliste de joueur de courses mais on retombe dans le mauvais lorsqu'on nous présente un personnage qui ne sait soit-disant pas bien conduire en vrai et qui doit s'échapper de la police dans une scène qui aurait sa place dans une adaptation de Need for Speed ou GTA. Le climax de la médiocrité arrive lorsqu'il s'agit de se qualifier pour la GT Academy. Jann se rend in-extremis dans sa salle d'arcade où l'attend son meilleur pote qui lui fera des commentaires insupportables dans l'oreille alors que Jann se contente de doubler les meilleurs pilotes du monde comme si c'était des IA en mode très facile.

Si par la suite, sur les circuits, le ressenti en course est plus intéressant, la seule façon que trouve la mise en scène de nous rappeler les origines de Jann sera en nous affichant sa position sur le circuit et les fameuses lignes de courses. Jann pourra alors doubler en passant par l'extérieur ce qui est fondamentalement absurde, à moins d'avoir une voiture largement supérieur ou par temps de pluie. Et le problème est qu'effectivement, bien que n'étant pas un joueur assidu de jeu de courses, j'ai quelques heures sur F1 de 2001 à 2012, Gran Turismo 5, Project Cars, Grid 2, Dirt Rally, et le film a vraiment du mal à faire ressentir ça. Même en connaissant les circuits du Red Bull Ring ou du Nürburgrin, à aucun moment on ne ressent la connaissance du comportement de la voiture sur les différentes portions du circuit, à différentes conditions météo (par exemple ce sur quoi insistait le film Michel Vaillant). Les choix des angles de caméra sera beaucoup trop rarement inspiré du jeu vidéo pour préférer des plans au drone avec les voitures incrustées en CGI pour pouvoir réaliser les dépassements impossibles. Ça manque à la fois de technique de course et de mécanique pour satisfaire les joueurs ou donner envie de s'intéresser au jeu, malgré les quelques plans qui y font penser comme au Mans avec une voiture qui se décompose pour retrouver Jann dans sa chambre.

 

Podium ou tout juste qualifié ?

Hormis le premier acte, le film est loin d'être désagréable. Les clichés du biopics ne sont pas si dérangeants, même la rivalité un peu ridicule très classique entre les pilotes. La scène de l'accident au Nordschleife est très bien reproduite et impressionnante, et le final au Mans arrive à créer cette sensation de climax grâce à une marseillaise et l'armée française totalement célébrées. Pour un film à 100 millions de dollars le résultat est honorable mais on se demande si une image qui passe en scope une fois dans des vraies voitures, et plus de travail sur la course en elle-même n'aurait pas rendu un spectacle plus intéressant à la Le Mans 66. C'est vraiment mieux qu' Uncharted, en même temps c'était pas compliqué. On terminera sur la bière, peut-être pas sur le champagne.

Commentaires